Pour la réussite de tous les élèves

Rapport de la commission « Thélot »

Voici quelques extraits significatifs pour la catégorie des Cpe

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Le débat a formulé l’objectif prioritaire : améliorer le fonctionnement de l’école pour faire réussir tous les élèves, c’est-à-dire élever globalement l’éducation et la qualification de la jeunesse et faire réussir chaque élève en fonction de ses capacités, de ses choix et de son mérite La commission a entrepris de donner sens à cette ambition en énonçant les trois exigences :
 assurer les conditions de possibilité de l’acte pédagogique et du vivre ensemble à l’École, en développant notamment l’éducation à la civilité et à la citoyenneté pour faire face au défi que représente la
montée de la violence, des incivilités, et du communautarisme ;

QUEL EST LE CONTEXTE POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DE L’ÉCOLE FUTURE ?

La Commission a ainsi considéré que la réflexion sur l’avenir de l’École devait s’inscrire dans un cadre défini à
partir de quatre perspectives :
 la nécessité de renforcer l’éducation au vivre ensemble ;

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Eduquer aux valeurs démocratiques et républicaines et garantir les conditions de la vie commune

Le respect des libertés, la reconnaissance des droits fondamentaux des personnes, notamment des enfants, la pacification et la laïcisation des mœurs ainsi que le progrès vers l’égalité marquent l’évolution de la société française. Mais celle ci continue d’être confrontée, aux difficultés liées à la « ghettoïsation » et à la communautarisation de certains quartiers : montée de la délinquance et des incivilités, des comportements racistes, antisémites, sexistes ou homophobes. La difficulté d’assurer la cohésion éducative du monde adulte - du fait notamment de l’influence grandissante des médias dans la socialisation de la jeunesse et de l’effritement des cadres éducatifs traditionnels des jeunes par la famille ou d’autres institutions - confère à l’École une mission éducative inédite à laquelle elle ne pourra et ne devra pas se dérober. La Commission a voulu mettre en évidence cette orientation et a tenté de concevoir les conditions qui permettront à l’École de mieux assurer sa mission éducative.

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A. L’École participe à l’éducation de la jeunesse en garantissant les conditions de l’acte pédagogique, en assurant la protection et l’équilibre des élèves, en formant au « vivre ensemble » et en préparant à l’exercice
de la citoyenneté.

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La réussite de l’École se définit également en termes éducatifs, psychologiques et moraux. Les critères de la réussite proprement éducative sont à la fois individuels et collectifs. Au plan individuel, l’École doit aider
les élèves à grandir, à devenir des adultes, des personnes autonomes et responsables, à cultiver le respect de soi et celui des autres, à développer la confiance en soi et dans les autres. Au plan collectif, il importe que les
élèves apprennent à reconnaître l’éminence des valeurs partagées et la nécessité des règles et des usages communs, afin de faire de l’École le lieu d’intégration de toute une génération, et où la mixité sociale, ethnique et culturelle demeure possible. Il n’y a pas de raison à cet égard d’opposer l’instruction à l’éducation ; l’École doit être un espace pacifié à l’intersection de l’individuel et du collectif. Ceci conduit à redéfinir le métier des enseignants, le rôle des parents, la part d’autonomie et d’initiative des établissements.

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Les missions prioritaires de l’École : éduquer, instruire, intégrer et promouvoir

Le choix fondamental en faveur de la réussite de tous les élèves se décline en trois axes de réflexion relatifs aux trois grandes missions de l’École que la Commission juge absolument prioritaires : éduquer, instruire, intégrer et
promouvoir.
Éduquer. L’École ne peut espérer instruire et former efficacement les élèves si les conditions qui garantissent la possibilité même de l’acte pédagogique ne sont pas réunies. Il faut donc retrouver le sens et la pratique des codes partagés, restaurer l’ordre et la confiance sans lesquels les professeurs ne peuvent faire travailler les élèves dans la sérénité. Il faut aussi que cette éducation conduise chacun à être capable de vivre avec les autres dans notre démocratie. Les Français ont rappelé, à l’occasion du grand débat national, que l’École ne pouvait éduquer seule : il lui faut donc développer des partenariats, en particulier avec les parents, qui sont les premiers éducateurs.
Instruire. Il s’agit en premier lieu de s’assurer de la maîtrise effective par tous les élèves du socle des connaissances et compétences nécessaires pour non seulement réussir dans la vie mais aussi réussir sa vie. En second lieu,il faut que l’École, après l’acquisition du socle commun, garantisse une vraie diversité des voies de réussite, en préparant au mieux les élèves à la vie professionnelle ou aux études supérieures.
Intégrer et promouvoir. L’École de la République est le creuset où se forme le pays, elle se donne pour ambition de compenser les effets des inégalités sociales de départ afin de donner à chaque individu la possibilité
de s’intégrer dans le monde social et la chance d’atteindre l’excellence dans la voie qu’il s’est choisie.

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En matière d’éducation de la jeunesse il est à craindre que, de pilier majeur, l’École soit parfois devenue pilier central, sinon exclusif. La fragilisation de la structure familiale classique comme l’érosion des structures
traditionnelles d’encadrement de la jeunesse modifient en effet considérablement la donne éducative : pour une proportion croissante de jeunes,l’École est aujourd’hui le seul lieu éducatif à dimension collective stable et clairement identifiée.

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L’École doit assurer la protection et l’équilibre des élèves. Les enfants et les jeunes les plus vulnérables ne peuvent bénéficier pleinement de l’enseignement dispensé à l’École. Raison pour laquelle celle-ci devrait
considérer que la première condition de sa réussite réside dans la prévention, le repérage et le traitement de l’absentéisme, des conduites à risque et des actes délinquants des adolescents. Pour ce faire il convient de
renforcer la cohérence et la cohésion éducative du monde des adultes : en s’appuyant davantage sur les conseillers principaux d’éducation (CPE) et les assistants d’éducation ; en approfondissant la dimension éducative du métier d’enseignant et l’éducation concertée avec les parents ; en développant les partenariats (associations et pouvoirs publics locaux, réseaux d’assistantes sociales, de psychologues et de médecins locaux,
entreprises, justice, police, médias, etc.).
L’École doit cultiver la civilité et préparer à l’exercice de la citoyenneté. Civilité et citoyenneté ne peuvent être confondues. L’apprentissage de la politesse doit précéder l’initiation à la politique. Les élèves doivent d’abord apprendre à respecter la loi, à se conformer aux règles de la vie commune et à se maîtriser. L’éducation civique permet ensuite aux adolescents de se préparer à l’exercice de la citoyenneté en accédant aux clefs du monde contemporain ainsi qu’aux valeurs démocratiques et républicaines. Pour progresser dans ces deux voies, il conviendrait de faire vivre une culture de respect des obligations et des engagements réciproques, en considérant que les engagements de l’École (sécurité, respect et progrès des élèves) doivent avoir pour contrepartie l’acceptation, par les élèves et leur famille, des règles de l’École et de la République laïque et démocratique.

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La Commission propose que cet apprentissage soit organisé par le directeur de la vie éducative du lycée (voir chapitre 5), pour souligner le fait qu’il ne doit pas prendre la forme d’un enseignement traditionnel. Peuvent y intervenir des enseignants de l’établissement, des enseignants extérieurs au lycée (professeurs d’autres lycées, universitaires, enseignants d’instituts d’études politiques, etc.), mais aussi d’autres intervenants (témoins, etc.). Il
serait hautement souhaitable que toutes ces interventions aient lieu à deux, à l’instar des travaux personnels encadrés (TPE). Cette formation pourrait souvent prendre la forme de débats favorisant une large expression des
élèves. Un horaire spécifique, clairement identifié dans l’emploi du temps, devra être attribué, et, en tout état de cause, être supérieur à celui de l’ECJS actuel.

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Chapitre 5
Renforcer la capacité d’action et la responsabilité des établissements scolaires
Pour mobiliser les établissements, la Commission recommande :
 la valorisation de ceux qui, à côté des enseignants, se consacrent à des tâches d’éducation ;
 l’implication de tous les partenaires de la communauté éducative ;
 l’instauration de périodes où les élèves sont accompagnés, en complément des cours, vers la réussite scolaire ;
 le renforcement de la collégialité pédagogique.
Pour améliorer le fonctionnement des établissements, la Commission préconise :
 l’émergence de nouvelles responsabilités au sein des établissements ;
 une répartition différenciée des moyens selon les établissements ;
 la création d’un statut d’établissement du premier degré ;
 un système de contractualisation pour chaque établissement ;
 la mise en place d’un pilotage de proximité.

Renforcer la fonction éducative de l’École - de manière à garantir les conditions de l’acte d’enseigner, à lutter plus efficacement contre l’insécurité et la démotivation qui semblent parfois gagner du terrain - et mettre en place une nouvelle organisation de la scolarité, afin d’assurer à tous la maîtrise d’un socle et de parvenir à un meilleur équilibre des diverses voies de formation, représentent aux yeux de la Commission les principaux enjeux de l’évolution nécessaire du fonctionnement des établissements dans les années à venir. De la qualité du fonctionnement des établissements scolaires dépend la capacité de l’École à remplir efficacement sa mission éducative. L’amélioration des conditions qui favorisent la réussite des élèves (sécurité,
considération, travail) passe par la mobilisation des volontés et des compétences à l’échelle de l’établissement scolaire - clef de voûte du système éducatif. La Commission considère que la capacité d’action des établissements (leur marge de manœuvre financière et pédagogique) doit être accrue et qu’il convient de renforcer l’autorité et la responsabilité du pôle de direction des établissements ; elle recommande que la mise en
œuvre de ces objectifs s’accompagne d’un fonctionnement plus collégial, renforçant le sentiment d’appartenance à une équipe et la cohésion au sein des établissements. Le surcroît de responsabilité dévolu aux établissements
devrait avoir pour contrepartie une évaluation des résultats dans le cadre d’une démarche de contrat fondée sur l’ambition de faire réussir tous les élèves.

RENFORCER LA FONCTION ÉDUCATIVE
La lutte contre l’absentéisme et la violence ainsi que, de manière plus générale, la fonction éducative de l’École - notamment l’apprentissage des règles de comportement - concernent tous les acteurs de l’École. Les enseignants, en particulier, du fait même de la place centrale qu’ils occupent dans l’esprit des élèves et de leur famille, ne peuvent occulter ce devoir d’éducation.
La cohésion éducative de l’École passe à la fois par une plus grande présence physique des adultes au sein des établissements et par l’exemplarité de leur comportement. Tous les acteurs de la communauté éducative et les partenaires de l’École sont impliqués dans l’éducation des élèves. La concertation entre l’équipe éducative et les parents est à cet égard nécessaire comme l’engagement de tous les adultes présents au sein des établissements, quel que soit leur statut.
La Commission estime nécessaire de valoriser et de renforcer les métiers de l’éducation. Il importe qu’à côté de celui joué par les autres personnels de l’école, notamment les enseignants, le rôle des CPE et des assistants d’éducation soit reconnu et valorisé. La Commission souhaite voir se constituer dans les collèges et les lycées un véritable service de la vie éducative, pourvu d’un directeur intégré à l’équipe de direction. Le nouveau directeur de la vie éducative1, choisi par le chef d’établissement parmi les CPE - dont le nombre doit dépendre de la situation de chaque établissement et des besoins mis en évidence par le contrat passé avec les autorités de tutelle - se verrait confier l’organisation de la vie scolaire et la mise en œuvre de plusieurs fonctions : la surveillance, l’apprentissage de la civilité et l’éducation à la citoyenneté, l’orientation (en collaboration avec les conseillers d’orientation et les enseignants) ainsi que, en liaison avec les enseignants responsables de la pédagogie, l’accompagnement pédagogique des élèves.

(1 En identifiant une fonction de direction et par l’évocation d’un directeur de la vie éducative puis d’un directeur des études, la Commission n’entend pas signifier qu’il est nécessaire d’instituer un poste pourvu par une personne déterminée (voir plus loin l’encadré
5.3) ; l’exercice d’une responsabilité doit dépendre de la taille de l’établissement dans ses modalités et demeurer compatible avec la collégialité et le décloisonnement des fonctions que préconise par ailleurs la Commission.)

La fonction de CPE pourrait constituer pour les professeurs une diversification de carrière possible : on pourrait ainsi envisager qu’après une période consacrée entièrement à l’enseignement, un professeur titulaire
puisse demander à devenir CPE sur tout ou partie de son temps de service. Un tel décloisonnement permettrait aux personnels de la vie éducative de s’impliquer davantage dans l’accompagnement pédagogique des élèves et
favoriserait leur coopération avec les enseignants au sein des établissements. Par ailleurs, la présence de jeunes adultes (assistants d’éducation) est précieuse dans l’encadrement des élèves. L’établissement recruteur devrait prévoir pour eux des moments de formation permettant d’assurer leur adaptation au poste et leur intégration au sein de l’équipe éducative. Il convient de ne pas les réduire aux seules fonctions de surveillance et de les inciter à développer l’animation de projets, voire, selon leurs domaines de compétence, des actions de soutien scolaire, des moments de dialogue. Les dispositifs d’accompagnement des élèves constituent en effet l’un des moyens d’assurer conjointement une plus grande efficacité en matière d’éducation et de pédagogie.
La mission des enseignants dépasse la simple transmission de connaissances. L’École ne peut faire face à la nouvelle demande d’éducation sans décloisonner les métiers en son sein. Il importe à cet égard de redéfinir le travail de l’enseignant autour d’activités plus diverses (coordination de discipline et de cycle, orientation, accompagnement des élèves) et d’ouvrir le dossier du temps de présence hebdomadaire dans l’établissement (sur ces points, voir le chapitre 6). Cela devrait conduire à prévoir, au sein des établissements, l’aménagement d’espaces de travail pour les enseignants et l’équipement adapté (téléphones, ordinateurs...). Loin de s’exclure, éducation et instruction progresseront de concert dès lorsque la collégialité et l’exemplarité se développeront au sein des établissements. Ainsi, l’apprentissage de la civilité - élément du socle commun - qui est confié dans le primaire au professeur des écoles relève au collège de l’ensemble de l’équipe éducative, sous la responsabilité
conjointe du directeur de vie éducative et d’un professeur coordonnateur. Il est par exemple évident que l’efficacité éducative requiert que les mêmes règles de comportement soient observées dans chaque cours, ce qui est impossible sans un travail collectif des enseignants pour s’accorder sur des règles cohérentes. Dans la même perspective, il est nécessaire que la dimension éducative soit davantage prise en compte dans le recrutement et
la formation des professeurs débutants.
La définition d’une éthique professionnelle est nécessaire. Le comportement des adultes au sein des établissements devrait toujours être exemplaire : respect et considération des élèves, correction du langage et de
la tenue, devoir de réserve vis-à-vis des institutions font partie des exigences du métier d’éducateur et, par ailleurs, du statut de la fonction publique. De manière générale, ce qui va dans le sens d’un affichage explicite de références communes en matière de règles de comportement ne peut que contribuer à renforcer l’autorité adulte au sein des établissements. L’éducation concertée avec les parents devrait ainsi pouvoir s’établir sur la base de règles explicites définissant le rôle et la place de chacun. Face aux difficultés auxquelles elle se trouve confrontée, l’École doit trouver en elle-même les ressources lui permettant de donner un nouvel élan à sa mission éducative. Toutefois, il pourrait être opportun que la Nation manifeste solennellement son engagement en faveur de la réussite de tous les élèves en formulant explicitement les conditions d’une École juste et efficace. La rédaction d’une Charte de l’École peut ainsi être envisagée comme l’un des moyens de régénérer le pacte unissant la Nation à son École. L’encadré 5.1 illustre ce que pourrait être une telle charte.

ENCADRÉ 5.1
CE QUE POURRAIT ÊTRE UNE CHARTE DE L’ÉCOLE
La Charte de l’École à laquelle la Commission songe aurait pour double fonction de renforcer l’autorité des valeurs, des règles et des usages de l’École auprès de ses acteurs ou de ses usagers et d’assurer une plus grande lisibilité des engagements et du fonctionnement de l’École. Une telle « Constitution de l’École » permettrait ainsi de promouvoir une culture de l’association entre les Français et leur École, une véritable culture de respect des obligations et des engagements réciproques. Le texte, concis et clair, contiendrait six types d’éléments :
1. Les principes républicains et les valeurs démocratiques que le fonctionnement de l’École de la République se doit de prendre en compte et d’incarner.
2. Les principes d’une éducation humaniste, républicaine et démocratique.
3. Les missions et les objectifs que l’École s’engage à réaliser.
4. Les engagements, en termes de règles et d’usages, que les personnels de l’École, les élèves et les parents doivent prendre afin de garantir le respect mutuel et les conditions de l’efficacité de l’acte éducatif.
5. L’explicitation des grandes modalités de l’éducation concertée avec les parents -quand bien même celles-ci ont vocation à être déclinées et approfondies au plan local.
6. Les grandes règles de fonctionnement global de l’École (notamment les modalités de l’articulation entre les niveaux national, territorial et celui de l’établissement).
Un tel texte, approuvé par les représentants de la Nation, aurait ainsi vocation à constituer une référence au plan national. Il pourrait être affiché dans tous les établissements, distribué aux familles et décliné au niveau des politiques d’établissement, notamment au moment de la rédaction des règlements intérieurs. L’élaboration de cette Charte de l’École pourrait par exemple être confiée à l’autorité indépendante chargée d’élaborer le socle commun et de définir les programmes (le Haut Conseil de l’Éducation). Une création en trois phases pourrait même être imaginée : une phase de consultation - facilitée par l’utilisation de l’outil informatique (forum public) - associant tous les acteurs, usagers et partenaires de l’École ; une phase d’élaboration par le Haut Conseil de l’Éducation ; une phase enfin de consécration par les représentants de la Nation. Le
texte pourrait ensuite faire l’objet d’une révision à échéances régulières (tous les cinq ou dix ans), suivant la même procédure.
Parce qu’il est nécessaire d’associer tous les acteurs de la communauté éducative à la vie de l’établissement, et, en particulier, de renforcer l’éducation concertée entre les familles et les enseignants, la Commission préconise dans les écoles, collèges et lycées la création d’un conseil de la communauté éducative -présidé par le chef d’établissement et qui comprendrait des représentants des personnels, des parents et des élèves ainsi que les membres de l’équipe de direction. Cette instance de dialogue, de formation et de reconnaissance des acteurs, pourrait être investie des missions suivantes
 prendre en charge l’élaboration du règlement intérieur ainsi que la réflexion collective relative aux obligations réciproques entre les différents acteurs ou à la question de l’éducation à la vie en commun ;
 s’efforcer d’améliorer la lisibilité de l’École auprès des familles - notamment auprès de celles qui sont les plus éloignées de l’École : le Conseil pourrait ainsi être chargé d’organiser des actions associant parents et personnels au sein de l’établissement (d’organiser par exemple un débat, chaque année) ;
 réguler toutes les questions de vie scolaire, d’orientation, de participation des élèves et de qualité de la vie dans les établissements. ;
 se saisir des questions de violence, d’incivilités et, plus généralement, de non-respect du règlement intérieur de l’établissement, et se réunir quand les circonstances le demandent en conseil de discipline.
La mise en place du conseil de la communauté éducative devra s’accompagner de la suppression de toutes les commissions et organes de consultation existants (commission permanente, comité d’éducation à la santé et à la
citoyenneté, commission d’hygiène et de sécurité, conseil de la vie lycéenne, etc.).
Les mesures préconisées ci-dessus définissent un nouvel équilibre entre transmission des savoirs et mission éducative. Elles favorisent ainsi la cohésion et la solidité de la communauté éducative nécessaires à l’efficacité
des mesures de prévention et de vigilance quotidiennes que suppose la lutte contre la violence et les incivilités.
La Commission recommande à chaque conseil de la communauté éducative de définir un plan de prévention et de réaction concerté pour lutter de manière appropriée contre la violence, les incivilités et tous les actes
délictueux. La cohérence des réponses de la communauté éducative, la qualité des partenariats instaurés, avec la police et la justice en particulier (voir chapitre 8), la rapidité de la mobilisation des équipes et la gradation et
l’équité des mesures et sanctions qui seront prises constituent des éléments indispensables à un traitement efficace des situations. Ces sanctions seront proportionnées à la gravité de l’acte en se donnant réellement les moyens de les appliquer. Elles devraient aller de travaux d’intérêt général dans l’établissement, plébiscités lors du grand débat national, à des mesures d’exclusion temporaire puis définitive. Pour traiter des cas extrêmes et en
particulier éviter que les élèves très difficiles soient simplement déplacés d’un collège à l’autre, la Commission recommande de développer des dispositifs tels les classes et ateliers relais qui ont fait la preuve de leur efficacité (voir aussi chapitres 1, 3 et 8). Enfin, elle rappelle que l’exigence d’accueil de tous les jeunes dans le système scolaire ne vaut stricto sensu que durant la scolarité obligatoire. Par ailleurs, le traitement des délits (agression, violences physiques et mentales, racket...) ne relève pas de la seule action éducative de l’École, il est aussi de la compétence de la justice qu’il convient de saisir. Cette politique de lutte contre les violences et les incivilités doit être étroitement liée à la formation de la personne et à l’éducation du citoyen que la Commission appelle de ses vœux (voir chapitres 1 et 2). Toutes deux constituent un véritable « engagement d’éducation au respect » qui devrait constituer un volet du contrat d’établissement (voir ci dessous) et permettre de réduire notablement le nombre et la gravité des actes de violence en milieu scolaire. Pour que l’encadrement des élèves soit efficace, il est nécessaire que les établissements scolaires conservent une taille « humaine ». Il est
toutefois difficile d’établir le nombre d’élèves par école, collège ou lycée conditionnant la possibilité de l’acte éducatif : on ne peut, du fait de la diversité des situations (centre ou périphérie, lycée général ou professionnel, etc.) définir de taille optimale. La Commission considère néanmoins qu’il s’agit là d’une question qui illustre la nécessité, dans la perspective d’une École juste, de faire un usage différencié des moyens consacrés à l’éducation. L’École doit tenir compte du fait que les nouvelles conditions de la vie sociale permettent plus difficilement aux parents de veiller sur leurs enfants et de les aider lorsqu’ils sortent de l’établissement. La mise en place de dispositifs d’accompagnement des élèves à l’école et au collège - conséquence nécessaire de l’organisation de la scolarité obligatoire préconisée par la Commission - permettrait de limiter le laps de temps
durant lequel, trop souvent, les enfants et les adolescents sont de fait livrés à eux-mêmes. La Commission estime que l’efficacité éducative et pédagogique serait considérablement renforcée si les élèves restaient dans l’établissement au-delà de leurs heures de cours certains jours de la semaine. L’élève, durant ces « études accompagnées », devrait notamment faire ses devoirs et apprendre ses leçons. L’équipe de direction aurait à
charge de définir les modalités d’exercice de ces fonctions d’accompagnement qui seraient assurées par des personnels de l’École (professeurs, CPE, assistants d’éducation), auxquels on pourrait éventuellement
adjoindre d’autres adultes (par exemple des professeurs à la retraite) ou des jeunes (élèves ou étudiants).

DÉVELOPPER LA COLLÉGIALITÉ DES PRATIQUES PÉDAGOGIQUES
L’autonomie pédagogique est l’un des attraits du métier d’enseignant. C’est à travers sa pédagogie que le professeur fait valoir sa créativité et son professionnalisme. Cette autonomie doit être non seulement préservée mais renforcée dans le cadre de la nécessaire réussite des élèves. L’autorité et l’efficacité de l’acte pédagogique ne peuvent en outre aujourd’hui se fonder que sur l’exercice, à l’échelle de l’établissement, d’une responsabilité et d’une expertise collectives. Il convient d’abord d’identifier les tâches ou les fonctions dont l’exercice requiert une prise en charge collective, le décloisonnement des métiers ou un élargissement des obligations de service.
Certaines d’entre elles découlent de la nouvelle organisation de la scolarité obligatoire que la Commission appelle de ses vœux :
 la coordination de tout ce qui, dans le socle commun, relève de compétences transversales - en particulier ce qui concerne l’apprentissage de la civilité, l’éducation à la vie en société, les technologies de l’information et de la communication. ;
 la coordination de l’éducation aux choix et de l’orientation ;
 la coordination de la personnalisation des apprentissages dans chacun des cycles.
D’autres concernent uniquement les collèges et les lycées :
 la coordination de discipline, qui doit être étendue à toutes les disciplines et qui consiste à veiller à l’organisation des conditions matérielles ainsi qu’à l’animation pédagogique de l’équipe disciplinaire ;
 l’organisation des examens.
Certaines, enfin, s’exercent dans tous les types d’établissement :
 l’organisation des relations avec les parents ;
 la lutte contre la violence scolaire et les incivilités dans la classe et l’établissement ;
 le remplacement des professeurs indisponibles ;
 l’accompagnement et le suivi des élèves ;
 l’accueil des professeurs arrivant dans l’établissement et la formation des assistants d’éducation ;
S’ajoute à cette liste et pour les seuls lycées la fonction de coordination de classe.
La coordination de la personnalisation des apprentissages dans chacun des cycles fait l’objet, à titre d’illustration, de l’encadré 5.2.

ENCADRÉ 5.2
LA COORDINATION DE LA PERSONNALISATION DES APPRENTISSAGES : EXEMPLE D’UNE NOUVELLE FONCTION D’ENCADREMENT : La fonction « coordination de personnalisation » dérive de l’objectif de personnalisation des apprentissages nécessaire pour transmettre à tous les élèves le socle commun des indispensables et pour les conduire vers leur voie de réussite. Elle organise le temps scolaire à l’intérieur de l’année scolaire et du cycle en fonction des besoins et du rythme de progression spécifiques de l’élève ainsi que de contribuer à personnaliser les pratiques pédagogiques. L’organisation nouvelle
du parcours des élèves à l’intérieur de la scolarité obligatoire. Cette fonction comprend notamment :
 la coordination de la personnalisation des modes d’apprentissage ;
 l’adaptation de la durée de cycle à la situationde chaque élève ;
 la constitution et le suivi des groupes d’apprentissage intensif ;
 la coordination des divers dispositifs d’accompagnement et de renforcement collectifs et individuels ;
 la coordination et l’organisation des évaluations collectives et en particulier celles de fin de cycle.
Dans le premier degré, la coordination de la personnalisation des apprentissages est assurée par un conseil de cycle composé des professeurs des écoles exerçant dans le cycle, du responsable de la coordination de la personnalisation des apprentissages au cycle 2 du collège ainsi que de représentants des parents d’élèves ; il peut, en tant que de besoin, être élargi aux partenaires de l’éducation dont l’intervention est jugée nécessaire (psychologue, médecin, assistant social,
etc.).
Dans le collège, elle est assurée par un professeur. Elle se substitue progressivement, à celle de la coordination de classe.

Pour être effectives, ces activités pédagogiques à la fois plus diversifiées et impliquant davantage le travail en équipe supposent une action d’animation et de coordination au sein de l’établissement. Cette fonction d’animation susceptible d’instaurer une réelle collégialité des pratiques pédagogiques pourrait être mise en œuvre par un conseil pédagogique, présidé par le chef d’établissement. Dans les écoles primaires (devenues des établissements du premier degré : voir ci-dessous), il serait composé des enseignants qui exercent dans l’école et associerait les coordinateurs des disciplines obligatoires du collège. Dans les collèges et les lycées, il comprendrait l’ensemble des professeurs coordonnateurs, de cycle, de classe ou de discipline, ainsi que le directeur de la vie éducative. Il assisterait l’équipe de direction dans la mise en œuvre des fonctions éducatives et pédagogiques que l’établissement doit prendre en charge ; entrerait également dans ses missions l’accueil des professeurs arrivant dans l’établissement et l’organisation des moments d’intégration et de formation des assistants d’éducation.
La Commission propose de faire émerger dans les collèges et les lycées un niveau de responsabilité supplémentaire au sein de l’équipe pédagogique en instituant un directeur des études intégré à l’équipe de direction : la responsabilité de l’animation pédagogique - ou de la coordination des diverses tâches pédagogiques - pourrait en effet être confiée à un professeur choisi parmi les professeurs coordonnateurs membres du conseil pédagogique. La Commission estime que l’instauration de ce niveau de responsabilité supplémentaire pourrait en outre favoriser la promotion interne au sein du système éducatif, en constituant un vivier pour le recrutement des cadres (personnels de direction ; inspections). Dans les lycées professionnels et technologiques, les chefs de travaux exercent déjà des fonctions d’animation et d’organisation qui pourraient justifier leur participation à la direction de l’établissement. La Commission propose donc d’instituer en plus du directeur des études, au sein de l’équipe de direction des lycées dans lesquels est dispensé un enseignement
professionnel ou technologique, un directeur technique dont les responsabilités correspondraient à celles de l’actuel chef de travaux.

AMÉLIORER LE FONCTIONNEMENT DES ÉTABLISSEMENTS
Le système éducatif doit passer du gouvernement par les règles au pilotage par les objectifs et les résultats. Fixer des objectifs tout en déterminant les principes et les valeurs à respecter, mettre en place les actions nécessaires
et évaluer le niveau de réalisation des objectifs devient la seule approche efficace. L’État doit à la fois affirmer plus nettement des priorités - se montrer exigeant sur les principes, les normes et les objectifs - et donner
davantage de responsabilités aux acteurs locaux pour définir les modalités de leur mise en œuvre. La Commission considère que l’échelon à privilégier, dans la dévolution de ces nouvelles responsabilités, est
l’établissement scolaire. Accroître la capacité d’action des établissements suppose que l’on renforce
l’autorité et la responsabilité de l’équipe de direction. Celle-ci remplit trois fonctions : pédagogique, éducative, administrative et financière. L’organisation des établissements doit être modifiée en vue d’un exercice plus
efficace de ces trois fonctions. Dans le cadre de l’école primaire, une reconfiguration complète de l’organisation s’avère nécessaire afin de créer les conditions, aujourd’hui inexistantes, d’un pilotage rationnel.
L’organisation des collèges et des lycées
Le fonctionnement interne des établissements du second degré serait assez profondément modifié du fait des diverses recommandations de la Commission : équipe de direction, conseil de la communauté éducative,
conseil pédagogique. L’encadré 5.3 illustre ce que pourrait être, à partir de ces recommandations, l’organigramme d’un collège ou d’un lycée public.

ENCADRÉ 5.3
UNE POSSIBILITÉ D’ORGANIGRAMME DE LA DIRECTION D’UN ÉTABLISSEMENT DU SECOND DEGRÉ
Cet organigramme est un organigramme de fonctions et vise essentiellement à formaliser ce qui se pratique déjà dans de nombreux établissements. L’exercice des trois fonctions de direction identifiées (pédagogique, éducative,
administrative et financière) peut s’effectuer, selon la taille de l’établissement, à temps plein ou à temps partiel ; dans les lycées professionnels ou technologiques, la fonction pédagogique est prise en charge par deux directeurs différents
(le directeur des études et le directeur technique). L’identification de responsables et l’exercice en commun de fonctions doivent être compatibles afin de favoriser un mode de fonctionnement fondé sur la collégialité et le décloisonnement.
Le chef d’établissement est secondé, lorsque la taille de l’établissement le requiert, par un adjoint dont la fonction se conçoit comme une fonction de remplacement du chef d’établissement mais peut aussi être spécifiée selon les besoins et les pratiques de l’établissement. La Commission estime nécessaire d’accroître la capacité d’action des établissements en termes de marge de manœuvre financière et pédagogique. Cette double autonomie doit être renforcée dans le cadre d’une démarche contractuelle : la Commission préconise un contrat tripartite, signé par l’établissement, l’autorité académique et la collectivité territoriale (le conseil régional pour les lycées, le conseil général pour les collèges). Pour promouvoir la diversification maîtrisée des établissements et donner plus de souplesse à leur fonctionnement, la Commission propose de définir la dotation horaire globale de chaque établissement à partir de trois « corbeilles » : une dotation identique pour tous permettant d’assurer
les enseignements communs ; 8% à 10% de la dotation horaire globale laissés à son libre usage contractualisé ; une dotation supplémentaire (qui pourrait aller de 0% à 25% de la dotation horaire globale) dévolue avec des
critères spécifiques, de manière à promouvoir la mixité sociale et le soutien des types d’élèves les plus défavorisés. L’autorité de l’équipe de direction (élargie du fait de la présence de CPE et de professeurs qui assurent la direction de la vie éducative, la direction des études ainsi que, au sein des lycées professionnels, la direction technique) ne peut qu’être renforcée par le développement de la collégialité. Il convient cependant, si l’on veut contribuer à améliorer le pilotage des établissements, de doter l’équipe de direction d’une plus grande capacité d’action. Le chef d’établissement ne doit pas seulement être le responsable vers qui l’on se tourne en cas d’incident mais le responsable de la politique conduite dans son établissement et des résultats que celle-ci induit. Cela implique, outre l’élargissement de l’autonomie financière et pédagogique, qu’on lui donne le pouvoir de contribuer à constituer son équipe de direction, en précisant les profils souhaitables et en donnant un
avis sur les personnes lorsque des postes sont à pourvoir. Cela suppose aussi que l’équipe de direction soit responsable du recrutement de certains personnels à l’instar des assistants d’éducation : vacataires et contractuels, enseignants ou non enseignants. La Commission préconise de donner aux collèges et aux lycées eux-mêmes la responsabilité de trouver les ressources nécessaires pour pallier dans les 48 heures l’absence ou l’indisponibilité d’un professeur. La gestion des remplacements, assurée au niveau de l’établissement
et qui pourrait être confiée conjointement à la direction des études et à la direction de la vie éducative, gagnerait ainsi en souplesse : une conception moins rigide des emplois du temps permettrait en effet qu’un professeur
absent puisse être remplacé par un collègue exerçant ou n’exerçant pas dans la même discipline. On éviterait ainsi de surcroît le recours à des remplaçants vacataires sans aucune formation. Le réseau des établissements
de proximité pourrait en dernière extrémité, c’est-à-dire s’il n’existe pas de solution interne, constituer un recours possible.