5 février 2006

Nos métiers

Déclaration FSU au CDEN collège Marne - 4 février 2006

D’après les documents qui nous ont été remis, notre département va connaître, une fois de plus, à la rentrée 2006,
une baisse du nombre d’élèves scolarisés dans les collèges, baisse de 364 élèves dont 50 en Segpa.
Et, une fois de plus, cette réduction du nombre d’élèves va s’accompagner d’une amputation de moyens, amputation
qui va, encore une fois, bien au-delà de ce que la baisse des effectifs aurait pu éventuellement justifier.

Qu’on en juge :
 Pour 314 élèves en moins, à raison de 23,5 élèves par classe, ce qui est la moyenne départementale, on devrait
aboutir à 13 divisions en moins. Eh bien, non ! 20 divisions sont supprimées !
 Pour 314 élèves en moins, hors Segpa, avec un H/E moyen de 1,30 au plan départemental, on devrait aboutir à
une ponction de 400 heures. Eh bien, non ! la dotation collèges correspondante va être réduite de 645 heures
(on passe de 28 104 à 27 459 heures).

Nous imaginons qu’il a donc fallu déployer des efforts d’imagination pour trouver un moyen de répartir la dotation
entre les différents établissements. C’est sans doute la raison pour laquelle les formules de répartition (formules
inaugurées l’an dernier car la dotation n’était plus suffisante pour appliquer les anciennes) ont dû à nouveau être
revues et qu’apparaît sous l’appellation pour le moins curieuse de « marge de manoeuvre » une dotation sans laquelle
aucun établissement ne pourrait fonctionner... ce qui limite singulièrement les manoeuvres.

Voilà donc les conséquences, au plan départemental, des décisions budgétaires votées il y a quelques mois par les
parlementaires.

 La baisse démographique a servi d’argument à une politique qui renonce à des choix ambitieux pour l’école,
qui passe d’une logique territoriale de lutte contre les inégalités à une soi-disant individualisation des parcours,
à la distinction de quelques élèves dits méritants et, parallèlement, au dynamitage des ZEP.

 La préoccupation de nos dirigeants n’est pas de lutter contre l’échec scolaire et de mettre en place dès le départ
des mesures d’aide et de soutien, de développer l’offre de formation, de multiplier le travail en petits groupes,
de renforcer la présence d’adultes qualifiés dans les établissements.
En effet, pour le gouvernement, l’échec actuel d’une partie des collégiens est considéré comme une fatalité sur
laquelle on ne pourrait agir. Aussi, avec l’instauration de l’apprentissage junior dès 14 ans, il va délester le
collège d’une partie de ses élèves, consacrer la remise en cause du collège pour tous, de la scolarité obligatoire
jusqu’à 16 ans. Cette mesure s’inscrit dans le droit fil de la loi Fillon caractérisée par son manque d’ambition
pour une partie de la jeunesse qui se trouve condamnée à des acquisitions réduites à un socle commun rabougri.
De cette façon, le gouvernement s’engage dans la mise en place d’une éducation à plusieurs vitesses, obérant
nettement toute visée égalitaire.

C’est dans ce cadre qu’il convient de replacer la diminution importante des postes offerts aux concours de recrutement,
la circulaire sur les remplacements, les atteintes à la formation des enseignants et à leur statut avec notamment
le retour de la bivalence...

C’est malheureusement aussi dans ce cadre qu’il convient de replacer la déplorable entreprise de démolition des
collèges Prévert et Picasso menée conjointement par le Conseil Général et l’Inspection Académique de la Marne.

Toute personne de bon sens et de bonne foi ayant connaissance de la réalité dans les collèges sait très bien
qu’il ne peut plus être question de regrouper plus de 600 élèves dans un établissement, notamment en secteur
urbain ; qu’un déplacement de population scolaire mérite réflexion sur le terrain ; qu’on ne casse pas, sans
conséquences néfastes pour les élèves, des équipes pédagogiques qui ont su mettre en place, avec la population
qu’elles accueillent, des dispositifs ayant montré leur efficacité comme en attestent les résultats de leurs élèves.

Et c’est vraiment ne pas manquer d’aplomb, que d’écrire, comme le fait Monsieur le Président du Conseil Général
aux chefs d’établissement de Châlons :

 « Notre préoccupation est d’offrir les meilleures conditions pédagogiques possibles aux enfants scolarisés
dans les collèges du département... Il nous est apparu primordial que les établissements ... disposent
d’effectifs suffisants.

 C’est là une condition fondamentale que nous ont réaffirmée lors de nos échanges les services académiques.
En effet, les élèves scolarisés dans des établissements de taille optimale »
(combien cette taille optimale ?)
« peuvent bénéficier à la fois d’une plus grande diversité d’options mais aussi de dispositifs de soutien scolaire
renforcés. »
(Ah, bon ? Nous n’avons jamais vu que les plus gros collèges bénéficiaient d’un renforcement
en heures de soutien ! Au contraire, il s’agit des établissements qui ont souvent les classes les plus chargées
et un H/E parmi les plus économiques). « Les enseignants pourront quant à eux effectuer leur service sur
un seul établissement... »
(C’est inexact. Dans un collège de plus de 18-20 classes, nécessairement les partages
de postes sont plus nombreux, à commencer par les professeurs d’éducation musicale et d’arts plastiques...).
« Enfin, chaque principal sera assisté d’un principal adjoint et d’un conseiller principal d’éducation... »
(N’est-ce pas déjà le cas à Prévert et Picasso ?).

 « En second lieu nous avons été très attentifs à ce que la nouvelle carte ...respecte les conditions de mixité sociale
dans les établissements. »
(mais Picasso et Prévert respectent ces conditions !). « Parallèlement à
l’amélioration de l’offre pédagogique »
(mais de quelle amélioration est-il question ?), « il s’agit ainsi de garantir
l’égalité des chances. La mixité sociale ne peut être favorisée qu’en élargissant le périmètre de recrutement
des collèges. »
Voilà une affirmation bien péremptoire qui ne s’appuie sur aucune analyse.

 Le comble revient sans doute à ce qui suit : « ...l’Assemblée départementale a affirmé son attachement à
l’intégration des élèves dans leur environnement. »
. À qui peut-on faire croire que la suppression d’un collège
de quartier est de nature à favoriser l’intégration des élèves dans leur environnement ?

 Quant à la phrase « ... je demanderai à Monsieur le Recteur le redéploiement des moyens pédagogiques et administratifs
du collège Jacques Prévert vers les collèges de l’agglomération châlonnaise »
, dans une période
où la chasse aux postes est plus ouverte que jamais, elle relève selon nous d’un discours démagogique et témoigne
d’une méconnaissance des règles d’affectation des personnels.

 Pour nous, les fermetures de Prévert et Picasso constituent de graves erreurs. Ces deux collèges sont tout à fait
viables : même en creux de vague des effectifs, les collèges de Reims et de Châlons auraient accueilli dans les
450 - 500 élèves en moyenne, ce qui nous semble une bonne chose.
La suppression des deux collèges va entraîner en 2007 une déstabilisation des collèges aux alentours, un accroissement
parfois démesuré de leurs effectifs, vraisemblablement une fuite d’élèves vers le privé ; elle va
créer des difficultés supplémentaires pour les élèves relevant de Segpa ; elle va nécessiter des travaux qui devront
être réalisés dans l’urgence, et même au mépris de la réglementation puisque la Segpa qui verrait le jour
à Saint-Memmie ne pourra être véritablement intégrée au collège récemment construit.

Nous aurions souhaité que Madame l’Inspecteur d’Académie aborde le dossier des collèges marnais en ayant toujours
à l’esprit les préoccupations de l’enseignante qu’elle avait été, préoccupations qui sans aucun doute auraient
rejoint les nôtres. Cela n’a malheureusement pas été le cas, des logiques comptables, voire partisanes l’ont emporté
et nous le déplorons.

Fermetures de collèges, suppressions de postes tant aux concours externes qu’internes, discours démagogiques,
attaques frontales contre le service public d’éducation, voilà ce que vivent les élèves, leur famille et les personnels.
De plus, ces derniers doivent faire face aux attaques contre leurs statuts, à la dégradation de leurs conditions de
travail et d’emploi, à la dégringolade de leur pouvoir d’achat. Et c’est pourquoi ils se sont retrouvés, avec leurs
collègues de la Fonction Publique, dans l’action jeudi dernier, le 2 février.

Sur l’ensemble des points que nous avons évoqués, nous vous prions, Monsieur le Préfet, de bien vouloir noter
notre demande de voir examinée d’une toute autre façon la situation de notre département et de transmettre à Monsieur
le Ministre notre volonté de voir s’ouvrir de véritables discussions sur les évolutions du système éducatif et
sur les revendications des personnels.