Intervenants : Y. Lefebvre, A. Cardoso, JL. Roger et Thérèse Moro.

Yannick Lefebvre présente le stage. Il s’inscrit dans la continuité des stages précédents concernant le métier, c’est un sujet récurrent. Ce stage représente aussi une étape car aujourd’hui nous ferons une proposition d’action.

Pb central qui remonte des HIS et stages : difficultés accrues à faire son métier, à faire un travail efficace. Difficultés qui augmentent d’après les collègues et de plus en plus difficile d’être satisfait.

Difficultés par rapport aux programmes, aux méthodes préconisées qui ne fonctionnent pas ou sont difficiles à mettre en œuvre, aux élèves. Les collègues font des arrangements mais perte de sens. Ces difficultés ne sont pas nouvelles, mais s’accélèrent, prennent de l’ampleur avec une mise au pas, culpabilité des collègues de la part de la hiérarchie. Ajouter à cela les suppressions de postes donc augmentation des effectifs, des postes à cheval…

Série d’exemples : nombre de réunions subies qui ne servent à rien, pb du livret de compétences, les chefs font des tableaux, des statistiques : mais à quoi ça sert ? Ils demandent des projets, font des rappels à l’ordre sur des tâches périphériques à l’enseignement, stage avec les IPR : cours virtuel pour des élèves virtuels, les entretiens d’évaluation aucune discussion sur le travail enseignant…

En fait de plus en plus de désaccords entre les profs et les hiérarchies sur ce qu’est « un bon travail ».

Demande de réaction de Yannick sur son constat :

Un stagiaire dans un collège ZEP confirme une montée de la pression et de plus en plus de tâches qui ne font pas partie du cœur du métier enseignant. Une autre rappelle qu’il y a de moins en moins de séparation entre vie privée et vie professionnelle. Manque de solidarité entre profs notamment sur l’entretien facultatif avec le chef.

Une stagiaire dit que le livret de compétence cautionne une logique d’entreprises avec des indicateurs de réussite mais en même temps le discours officiel est de laisser passer le plus d’élèves en seconde générale. On demande de plus en plus mais sans être payé c’est le cas des oraux de l’histoire des arts.

Un CPE rappelle aussi qu’on leur demande de plus en plus de chiffres mais le travail individuel avec les élèves se fait de moins en moins et de plus en plus de difficultés avec les profs. Le CPE se retrouve parfois en opposition avec les profs : est-ce l’effet recherché ?

Une collègue de lycée fait remarquer la lassitude des collègues qui conduit à développer une protection individuelle, souci du chef d’établissement c’est l’image du lycée donc de plus en plus de pb relationnel, réformes du lycée entraîne une concurrence entre collègues.

Yannick reprend la parole en disant que les profs et nous les syndicalistes sommes incapables de répondre à ces difficultés parce qu’elles ont hors du champ de l’action syndicale habituelle. Le Snes a mené un partenariat avec le CNAM : travail de recherche et en même temps le but est de trouver des pistes pour agir.

Jean-Luc nous présente un bilan de ce travail SNES/CNAM :

Ce qui préoccupe les collègues c’est la transformation du métier car brutalité pour imposer une nouvelle façon d’enseigner, car en fait nvelle conception de l’éducation. Il s’agit de prôner une gestion technocratique car conception politique du travail et cette conception est pensé par des experts qui ne connaissent pas le travail mais qui conçoivent comment ce travail doit être fait. Développement d’une vision virtuelle et les professionnels se débrouillent. A partir de là, les dilemmes de travail se multiplient.

Exemples de dilemmes :

comment faire cesser le bavardage d’un élève dans une classe ?

On s’adresse à lui seul ? À la classe ?

Quelles règles imposées dans une classe ? Comment les faire respecter ?

Aller à toutes les réunions ? Est-ce qu’on coopère avec l’administration ? Jusqu’à quel point ?

Ces dilemmes sont au cœur du métier et ils deviennent de plus en plus difficiles et les choix sont faits à l’instinct qui entraine des regrets. Il n’est plus possible de faire des choix positifs donc usure, fatigue, pb de santé et ça se retourne contre les élèves, les collègues… Ébranlement des valeurs et volonté de changer de métier.

Où trouver des ressources pour faire face ?

L’administration donne des réponses techniques et statistiques mais on ne parle plus du travail.

Pour le CNAM, le métier est un ensemble de 4 éléments :

1 : impersonnel : consignes, tâches qui viennent de l’institution.

2/transpersonnel : ce que le milieu enseignant s’empare de ces tâches, de ces consignes et comment ce milieu enseignant pense son travail (façon de faire, de penser). Sorte de culture du métier.

3/interpersonnel : ensemble des relations que les enseignants nouent entre eux pour faire le travail.

4/personnel : formation, valeur que l’on a du métier…

Aujourd’hui ces 4 éléments fonctionnent très mal donc on a de moins en moins de ressources pour faire son travail : conflit car l’institution fait une croix, combat la culture du milieu et la façon de travailler. La volonté est de changer le métier : installer un nouveau métier, il faut donc donner les bonnes pratiques, encadrer les enseignants. Tout ce qui fait du collectif est considéré comme caduc et doit être transformé donc ne reste que l’individu face à l’institution.


Alice Cardoso : Pourquoi le Snes s’intéresse à ces questions ?

Le danger c’est la transgression individuelle mais pas de réponse collective. Pour garder du sens à notre travail, on remet en cause les prescriptions de l’administration. Ce qui est surtout remis en cause aujourd’hui c’est la transmission disciplinaire. Ce qui est à la mode, c’est tout ce qui est en dehors des disciplines : transdisciplinaire, orientation, accompagnement individuel, regroupement des disciplines… Tout cela renforce les difficultés du métier. Les réformes se succèdent et l’idée des managers c’est que travailler, c’est juste appliquer mais aucun débat sur ces transformations.

Syndicalement, le métier est une question-clé car volonté de le changer et donc évaluation au mérite. Il est difficile de donner des contre-propositions même le Snes. Le Snes se demande quelles armes donner aux enseignants pour recréer du collectif. Toutes ces questions interrogent le Snes.

Chaque enseignant a son avis sur le métier donc l’objectif n’est pas de proposer une contre-recette à l’administration. Nécessite de réinventer le métier et pour le Snes tout en défendant une valeur essentielle : école pour tous.

Jean-Luc : que peut-on faire ?

Ne pas s’engager dans des aides personnelles, de la compassion mais réfléchir au métier lui-même. Qu’est-ce que c’est qu’un travail de qualité ? Comment le faire ? … Se mettre d’accord sur des façons personnelles de faire le travail et récréer du collectif pour discuter avec l’administration. Qui va créer du collectif ? Pas l’administration, pas les chercheurs, seuls les syndicats peuvent le faire. Il faut créer des collectifs de travail (le cnam a 10 ans d’expérience aves le Snes). Comment créer ces collectifs ? Pas sur les valeurs, pas sur les réactions/aux politiques, pas de discours, pas de récits. Le cnam est rentré par « des traces de l’activité » : les discussions doivent se faire autour d’activités précises et les gens doivent parler de leur façon de faire.

Réalisations de vidéo ou chacun est confronté à ce qu’il fait avec un intervenant et qui explique ce qu’il fait. Beaucoup se sont découverts à faire quelque chose. Ensuite la discussion s’engage sur le pb posé par la vidéo et non sur les valeurs entre 2 profs. Il faut essayer de résoudre ces pbs : pas de recettes mais discussions. L’idée c’est qu’une expérience commune se développe.

Alice Cardoso

Le travail d’équipe imposé par l’administration n’est pas le collectif que le Snes veut recréer.

Jen-Luc nous passe une vidéo sur un dilemme au travail. Un élève au bout de trois fois de suite le prof avec un autre collègue discutent du pb, enfin une discussion en groupe (plusieurs collègues). Des collègues ont été formés comme intervenants pour remplacer les chercheurs. A partir d’une situation précise, le débat se déplie. De ces collectifs : pas de compte-rendu, pas de consignes…C’est une expérience pour permettre aux enseignants de discuter. Le résultat : apport individuel car les individus prennent conscience de leur activité, apport collectif car qq groupes se sont formés surtout des collectifs disciplinaire. Y. Clot montre que lorsque les syndicats s’engagent dans ces démarches, il peut y avoir des résultats car enjeu majeur de la société.

Alice

Stage de deux jours au niveau national sur ce thème. Cela permet aux individus de se sentir légitime et loyal et en capacité de réagir. Cette démarche permet aux enseignants de prendre conscience de ce qu’ils font, de leur métier. Qu’est-ce qu’on en fait au niveau syndical ? ça reste simplement un travail de recherche, ce n’est pas le but du Snes, on interpelle l’institution (elle n’est pas vraiment intéressée), pour le Snes il faut transformer ce dispositif en outil syndical. Cette méthode sur les traces » doit évoluer. Le dispositif doit être plus léger mais c’est un pari du Snes, on ne sait pas ce que cela va donner. Il s’agit de remobiliser les enseignants en utilisant le métier, le travail. Le dispositif peut se faire au niveau d’un établissement, d’un S3, d’un bassin etc.…ne rien s’interdire. On peut travailler avec des syndiqués, des non-syndiqués ou avec d’autres syndicats. Pour le Snes il faut réaliser des réseaux pour donner des ressources. Le point faible c’est lorsque des collègues ont beaucoup de difficultés, ce n’est pas une réponse immédiate. Par contre pour beaucoup l’état d’esprit change.

Jean-Luc rappelle qu’il faut travailler dans le durée mais que cela ne prend pas beaucoup de temps (2h30 à 3h00 toutes les 6 semaines.)

Après-midi : travail en équipe.

Une consigne est donnée sur une trace d’activité. Chacun doit décrire une activité précise pour un sosie. Ensuite dans le groupe un collègue doit dire à l’oral ce que le sosie devra faire. C’est un exercice oral entre 2 collègues. L’objectif de cet échange c’est de se voir en train de travailler. On se retrouve ensuite tous.

Pour la majorité des stagiaires ce travail en atelier est intéressant : pas ressenti de jugement.

Jean-Luc : on se rend compte que ce sont des problèmes de métier donc dé-culpabilisation.

Alice Cardoso : prendre conscience des gestes du métier, des mots…pour mettre en avant les difficultés de l’enseignant. En partant de point de détail, on décrit une activité précise et on perle ensuite de plein d’autres difficultés du métier.

Jean-Luc : ce qui est important c’est de pouvoir traiter des questions de métier et que ces discussions servent à soi-même et aux autres, entre pairs. Chacun se rend compte alors que ce sont des problèmes de métiers et non des problèmes personnels. C’est pouvoir mettre en discussion les critères du bon travail : arme pour tenir le coup individuellement et réagir face à l’institution. C’est normal qu’il soit difficile d’analyser tout ce qu’on fait car il y a beaucoup de tâches invisibles, subjectives.

Alice Cardoso : Au niveau syndical, les questions qui nous gênent, on n’en parle pas. Syndicalement, on est parfois pris de court. L’intérêt de ce travail c’est de discuter.


Compte-rendu rédigé par Annie Bécret.